Alabama Monroe

     Il y a des films que l'on découvre sans en rien savoir, le hasard ayant permis la disponibilité de quelques heures, sans attente particulière, sans urgence à régler, sans préocuppation nouvelle... et ce qui nous avait totalement échappé lors de sa sortie en salle, dont on ignore tout, se révèle à la fois un pur instant de grâce, de beauté, de souffrance aiguë et d'expérience de vie, sans justification, juste un plein sentiment que la vie se présente là, dans ce qu'elle a de meilleur et de pire.

     Difficile, du coup, de raconter de quoi parle Alabama Monroe, de Felix Van Groeningen - réalisateur de La Merditude des choses - sans en dire trop. Didier, amoureux de la musique et de l'Amérique, portant la vie au bout de ses doigts et de son banjo parce que l'ancien punk qu'il était a trouvé dans le banjo la même hargne et la même colère, rencontre Elise, qui porte sur son corps et ses tatouages une vie un peu chaotique. De là une histoire d'amour, la construction d'une vie à deux, à trois, dans une ferme en ruine qui n'est ni la Belgique, ni l'Amérique, mais tout ça à la fois. Dans le meilleur comme dans le plus injuste, leur existence est rythmée par le bluegrass (branche de la musique country plutôt centrée sur une orchestration à cordes), par l'indispensable groupe d'amis qui joue avec eux, accompagne leur histoire.

     J'ai pu lire qu'on reprochait au film son pathos. Certes, on y traite de sujets terribles, mais comme ces sujets font aussi partie de la vie, quoi qu'il en soit, il est parfois bon de s'y confronter dans une belle forme... La structure du film atténue la dureté de certains passages, obligeant le spectacteur à reconstruire la linéarité de leur histoire et lui faisant prendre par là même une distance qui empêche de rendre trop insupportables certains moments de leur parcours. En fait, je crois que ce film figure pour moi parmi les plus belles histoires d'amour, aux côtés de films aussi différents qu'In The Mood for love ou The Eternal Sunshine of the spotless mind...

     Et parce que la musique est vraiment belle, voici l'intégralité de la musique du film. Si vous avez aimé celle de O Brother, Where Art Thou? des frères Coen, vous ne serez pas déçus !