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A quatre mains
5 février 2011

Edouard Glissant

enfants_du_paradis J'ai appris jeudi la mort d'Edouard Glissant avec beaucoup de tristesse...

Le Cahier d'un retour au pays natal de Césaire et les poèmes de Senghor découverts tardivement m'avaient menée à Glissant, à Chamoiseau, et ça avait été un émerveillement, l'expérience unique d'une redécouverte de la langue, comme si les mots étaient devenus autre chose, qu'ils avaient retrouvé un sens, fort et profond, sorti du tout-venant de la communication.

La découverte aussi de l'expression de valeurs d'humanité, de partage, de confiance en l'Autre, dont nous avons désespérément besoin par les temps qui courent...

Alors comme ça m'attriste, et que moi je ne sais pas écrire comme Glissant, je préfère laisser la place à sa voix, puisque Laure Adler rediffusait hier soir un Hors-Champs dont il était l'invité: http://www.franceculture.com/2011-02-03-disparition-d-edouard-glissant-ecrivain-et-poete-martiniquais.html

et à ses mots:

La forêt subitement hurle à la vie. Les étoiles, rôdeuses, envahissent les écluses. Vivante ô vivante, reine. Tes pieds vont le chemin, manguiers abandonnés. Ta peau retournée est un labour rouge. Vivante,

ô vivante mon matin de prairie toi ma nuit de prairie violée au combat des taureaux. Tu as glissé dans l’eau les halètements de ta silhouette coupée de verre. Au gué la plage noire le sable noir des caresses. Dans l’astre bel astre de tes mains. Tranquille battue d’aurores dans la nef incendiée de tes rêves, et ta voix de splendeur clamée, d’ivraie mêlée à l’ivraie : je suspends l’orage au reposoir de tes lèvres.

Ah soudain

la peur d’être deux

dans la beauté.

L’éclair de toi la chevelure des neiges l’éclair de toi air et amour entrelacés. Toi serpente et labourée. Moi, écume de tes pas.

Edouard Glissant, Le Sang Rivé, « éléments » 1947

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